La LFAIE limite l’acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger dans le but de prévenir l’emprise étrangère sur le sol suisse (voir l’art. 1 LFAIE). Pour cette raison, l’acquisition est soumise à une autorisation du canton compétent.
L’art. 5 LFAIE désigne par personnes à l’étranger les ressortissants étrangers qui ont leur domicile à l’étranger et les ressortissants étrangers qui ont leur domicile en Suisse mais ne sont ni ressortissants d’un État membre de l’Union européenne (UE) ou de l’Association européenne de libre-échange (AELE) ni tutélaires d’une autorisation d’établissement (permis C). Les ressortissants du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord qui ont leur domicile légal en Suisse depuis le 1er janvier 2021 (ou depuis une date ultérieure) sont également considérés comme des personnes à l’étranger. En plus des personnes physiques, les personnes morales et les sociétés sans personnalité juridique mais ayant la capacité d’acquérir (par ex. les sociétés en nom collectif ou en commandite) sont elles aussi considérées comme des personnes à l’étranger lorsqu’elles ont leur siège statutaire ou réel à l’étranger ou qu’elles l’ont en Suisse mais que des personnes à l’étranger y occupent une position dominante (voir les art. 5, al. 1, let. b à d, et 6 LFAIE).
La LFAIE énumère de manière exhaustive les motifs justifiant l’octroi d’une autorisation (voir l’art. 3 en rel. avec les art. 8 et 9 LFAIE). Lorsqu’il existe un tel motif dans un cas d’espèce et que toutes les conditions sont réunies, le requérant peut prétendre à l’autorisation. Abstraction faite des conditions spécifiques d’autorisation liées aux banques et aux institutions d’assurance ou de prévoyance, les motifs d’autorisation suivants peuvent être invoqués par les personnes physiques de nationalité étrangère domiciliées à l’étranger :
3.1 Héritiers institués: les héritiers institués et les légataires qui ne sont pas des héritiers légaux et ne sont donc pas exemptés du régime de l’autorisation (voir l’art. 7, let. a, LFAIE) et qui ne peuvent pas invoquer d’autre motif d’autorisation sont en règle générale autorisés à acquérir l’immeuble avec la charge de le revendre dans les deux ans (art. 8, al. 2, LFAIE).
3.2 Logements de vacances / appartements dans des apparthôtels : l’acquisition d’un logement de vacances ou d’un appartement dans un apparthôtel par une personne à l’étranger peut être autorisée à certaines conditions (art. 9, al. 2 et 3, et 10 LFAIE). L’acquéreur doit pouvoir utiliser lui-même le logement en tout temps dans le but invoqué, ce qui signifie qu’il ne peut pas le louer durablement. Les logements de vacances peuvent être loués périodiquement, mais non à l’année. Les appartements dans un apparthôtel doivent être exploités en la forme hôtelière, notamment pendant la haute saison (art. 10, let. b, LFAIE) ; cette condition vaut également pour une personne non assujettie à l’autorisation lorsqu’elle acquiert un appartement avec des charges correspondantes, celles-ci étant liées à l’objet (art. 7, al. 2, de l’ordonnance sur l’acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger (OAIE). Les appartements dans les apparthôtels ne peuvent être acquis que par des personnes physiques, à leur nom; il n’est pas possible de les acheter indirectement par le biais d’une société (art. 8 OAIE).
Ce motif d’autorisation peut être invoqué lorsque le canton l’a inscrit dans sa propre législation et que le logement se trouve dans un lieu désigné comme étant à vocation touristique. Une telle autorisation peut actuellement être obtenue dans les cantons suivants: Appenzell Rhodes extérieures, Berne, Fribourg, Glaris, Grisons, Jura, Lucerne, Neuchâtel, Nidwald, Obwald, St-Gall, Schaffhouse (seulement pour les apparthôtels), Schwyz, Tessin, Uri, Vaud et Valais.
Les autorisations qu’un canton peut accorder à ce titre sont soumises à des contingents annuels, fixés par le Conseil fédéral (art. 11 LFAIE). Si le contingent est épuisé pour l’année en cours, l’acquéreur ne pourra pas obtenir d’autorisation l’année en question. Les contingents annuels cantonaux figurent à l’annexe 1 OAIE.
3.3 Résidences secondaires : l’acquisition d’une résidence secondaire par une personne physique à l’étranger peut être autorisée si la personne entretient des relations extrêmement étroites et dignes d’être protégées avec le lieu en question (art. 9, al. 1, let. c, LFAIE). Ce motif d’autorisation peut être invoqué lorsque le canton l’a inscrit dans sa propre législation. Il s’agit actuellement des cantons suivants: Appenzell Rhodes extérieures, Bâle-Ville, Fribourg, Grisons, Jura, Lucerne, Neuchâtel, St-Gall, Soleure, Tessin, Uri, Vaud, Valais et Zurich.
La LFAIE prévoit une série d’exceptions à l’assujettissement qui ont une grande portée pratique. En voici les principales.
4.1. L’immeuble sert d’établissement stable
Si l’immeuble est utilisé à des fins économiques ou commerciales, à savoir en tant qu’établissement stable pour faire le commerce, exploiter une fabrique ou exercer en la forme commerciale une autre industrie, ou encore pour exercer une activité artisanale ou une profession libérale, l’acquéreur à l’étranger ne doit pas solliciter d’autorisation (art. 2, al. 2, let. a, LFAIE). L’exception vaut notamment pour les bâtiments industriels, les bureaux, les centres commerciaux, les magasins, les restaurants, les ateliers ou les cabinets médicaux. Que l’immeuble soit utilisé par l’acquéreur ou qu’il soit loué à des tiers pour exercer une activité économique n’a aucune influence.
Il n’y a pas d’établissement stable si l’immeuble est affecté à la construction ou à la location, à titre professionnel, de logements (art. 3 OAIE). Les logements qui sont exploités en la forme hôtelière sont quant à eux considérés comme des établissements stables dont l’acquisition et la construction sont exemptés du régime de l’autorisation.
4.2 Les liens de parenté
Lorsqu’une personne physique à l’étranger hérite d’un immeuble, elle n’est pas soumise au régime de l’autorisation – à la condition d’être un héritier légal au sens du droit suisse. Il en va de même lorsqu’elle est un parent de l’aliénateur en ligne ascendante ou descendante, son conjoint ou son partenaire enregistré (art. 7, let. a et b, LFAIE).
4.3 Les frontaliers
Les personnes physiques qui travaillent en Suisse sans y être domiciliées peuvent acquérir un immeuble sans autorisation dans la région de leur lieu de travail. Cette règle s’applique exclusivement aux ressortissants des États membres de l’UE et de l’AELE (art. 7, let. j, ch. 1, LFAIE) et, à certaines conditions, aux ressortissants du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (art. 7, let. j, ch. 2, LFAIE).
C’est le canton où se trouve l’immeuble qui met en œuvre la LFAIE (voir l’art. 15 LFAIE). Lorsque le conservateur du registre foncier ne peut pas d’emblée exclure que l’acquisition soit soumise au régime de l’autorisation, il demande à l’acquéreur de s’adresser à l’autorité cantonale compétente (art. 18, al. 1, LFAIE). Celle-ci examine si l’acquisition répond aux exigences légales et peut être autorisée. Si elle considère que l’acquisition est licite et délivre l’autorisation, l’autorité de recours cantonale et, subsidiairement, l’Office fédéral de la justice sont compétents pour examiner que la décision de l’autorité cantonale de première instance est conforme au droit.
Si l’autorité de recours cantonale renonce à recourir (et approuve de ce fait la décision de l’autorité cantonale de première instance), le dossier est transmis à l’OFJ (art. 17, al. 3, LFAIE). Les dossiers que reçoit l’OFJ ont donc déjà été examinés quant à leur conformité avec la LFAIE par deux autorités cantonales. L’OFJ examine à son tour si la décision de l’autorité compétente est conforme au droit fédéral ou s’il faut recourir contre elle. Cette étape vise à garantir que la LFAIE est appliquée de la même façon dans toute la Suisse.
La LFAIE a la particularité d’habiliter le Conseil fédéral à exempter une acquisition du régime de l’autorisation, au cas par cas, lorsque l’intérêt supérieur de la Confédération le commande (art. 7, let. h, LFAIE). Ne peuvent être pris en compte comme intérêts supérieurs de la Confédération que des intérêts publics de portée nationale essentiels et prépondérants, aptes à préserver ou à promouvoir des éléments essentiels de la vie politique, économiques, scientifique ou culturelle du pays (Jurisprudence des autorités administratives de la Confédération, JAAC 68.12, consid. 3).
Le Conseil fédéral a exempté du régime de l’autorisation au sens de l’art. 7, let. h, LFAIE l’acquisition d’immeubles par certaines organisations sportives internationales, en soulignant l’importance que revêtent pour la politique du sport, la culture et l’économie les fédérations actives à l’échelon international qui ont leur siège en Suisse (voir la JAAC 68.12). Le Conseil fédéral a également évoqué l’intérêt supérieur de la Confédération en lien avec la réalisation d’un complexe de vacances à Andermatt (voir les communiqués aux médias ci-dessous). La décision rendue par le Conseil fédéral dans ces cas n’est pas susceptible de recours et est donc définitive.
Jurisprudence des autorités administratives de la Confédération JAAC 68.12
Communiqués aux médias
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Le complexe de vacances d'Andermatt pourra être réalisé; le Conseil fédéral approuve la demande en vertu de l’intérêt supérieur de la Confédération
22 septembre 2006
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Réalisation du complexe de vacances d’Andermatt : derniers obstacles aplanis - Le Conseil fédéral agréée une demande complémentaire
21 décembre 2007
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Le Conseil fédéral prolonge jusqu’à fin 2040 l’exemption d’autorisation accordée au projet touristique d’Andermatt
24 février 2021
L’aide-mémoire suivant contient des informations complémentaires (qui ne sont pas juridiquement contraignantes):
Dernière modification 29.11.2023